LON CHANEY
Lon Chaney, de son vrai nom
Leonidas Frank Chaney, naît le 1er avril 1883 à Colordo Springs, dans le
Colorado.
Lon sera toujours l'homme délaissé par la femme qu'il aime en raison de
son infirmité : personnage tordu, difforme, paralysé, borgne, sans bras et
torturé moralement par les affres d'un amour impossible.
Mais dans tous ces rôles mélodramatiques, le comédien parvient toujours
à rendre son personnage attachant et même parfois déchirant, par sa sincérité
et sa puissance.
Mais l'arrivée du parlant menace sa carrière alors au sommet de sa
gloire. Après plusieurs mois de réticences et d'hésitations, Lon Chaney accepte
enfin de tourner son 1er film sonore (qui sera aussi le seul) : "Le Club Des Trois" (1930).
Il joue le rôle d'un ventriloque qui s'exprime par 5 voix différentes
dans le cours du film, confirmant qu'il voulait ajouter à son surnom fameux de l'Homme
aux mille visages, celui tout aussi
prestigieux de l'Homme aux mille voix.
De nombreux projets lui sont alors soumis. Tod Browning songe à lui
pour le personnage de Dracula qu'il prépare mais se sera Bela Lugosi qui
reprendra le flambeau. Mais le destin ne devait pas lui permettre de
concrétiser ce projet. Peu après la sortie de son 1er film sonore, Lon Chaney
tombe malade.
Lon Chaney déède le 26 août 1930 d'un cancer de la gorge qui lui fait
perdre l'usage de la parole à Hollywood, en Californie.
Lon Chaney a la
capacité dérangeante de tendre son corps, le détendre (ses parents étaient
sourds-muets, d’où cette gestuelle impressionnante). Il impose à son image
d’acteur, l’image, également, d’une métamorphose. Il est toujours en passe
d’être, il devient, se transforme et comme on le sait, le devenir n’est jamais
chose apaisante. Certes le maquillage, mais à l’encontre des autres acteurs qui
se griment pour être L’Homme qui rit
ou Le Bossu, le comédien
fétiche de Browning a saisi la grandeur de ce passage constant entre ce qu’il
doit incarner et ce qu’il doit être, et qui fait la spécificité des oeuvres de
Tod Browning, il se situe dans cet entre-deux. Il n’est donc pas étonnant que
Lon Chaney ait, au cours de sa carrière cinématographique, joué bien souvent deux
personnages (de L’Oiseau noir à
L’Inconnu en passant par Le Club des trois), apposant la dualité
comme espace de cet entre-deux.
On ne peut
décemment et impunément, ainsi le souffle Tod Browning dans L’Inconnu, L’Oiseau noir, ou Freaks,
s’attaquer à la monstruosité sans en payer, "chairement", le prix.
La réalité
rejoindra la fiction : Lon Chaney s’éteindra d’un mal incurable provoqué par un
maquillage en 1930, un cancer des cordes vocales (selon d’autres sources, il
s’agit d’un cancer des poumons, mais la légende est tenace). Ironiquement, Lon
Chaney est aussi l’auteur de l’article « Maquillage » dans l’Encyclopédie
Britanica.
Et ce prix, ce
prix-là, au plus fort, au plus déroutant, aucun cinéaste n’a osé l’infliger à
un comédien. Dans la chair, il faut payer et la grandeur de ce cinéma réside en
l’appréhension de corps monstrueux qu’il s’agit de dérouter. A l’opposé d’un
David Lynch ou d’un David Crononberg, Browning dévie la représentation
classique du monstre, nuls effets, nuls oripeaux, nuls trucages. L’acteur doit
trouver, au fond de son corps, la marque d’une probable difformité. Le
maquillage n’est là que pour soutenir la prouesse monstrueuse, il n’est pas
l’instrument qui va faire croire que. Chez Browning, le corps seul est
l’instrument de la déviation, et pour parler du handicap, il filme les
potentialités de ce même corps.
Mieux qu’un
autre, Tod Browning scandalise le monstre. Et ce scandale, dans la première
étymologie hébraïque, signifie bien « obstacle » « ce qui fait trébucher ». Le
monstre se définit scandale, obstacle. Alonzo appose lui-même ses propres
obstacles, il aspire à la monstruosité, il se scandalise et fait trébucher son
corps. Les Freaks de 1932 déroutent Cléôpatre, ils sont obstacles à ses
ambitions, ils la font trébucher et la trapéziste chute effectivement. Ces
Freaks-là aspirent, de plus, à rendre la monstruosité contagieuse. Et à son
tour, Tod Browning contamine ses personnages, de Dracula à Paul Lavond dans Les Poupées du diable. Il leur délivre un potentiel
monstrueux, leur fait accéder à cet univers où le scandale est manifeste dans
les replis d’un corps, toujours corps métamorphosé, corps en changement, en
incertitude, quoi qu’on en dise. Et c’est bien l’incertitude qui traverse le
corps de Lon Chaney dans les films de Browning, incertitude non pas sur ce
qu’il devient, mais sur ce qu’il est devenu, incertitude non pas sur ce qu’il
est, mais sur ce qu’il était. A l’encontre des comédiens qui jouent le handicap
et pensent le jouer vraiment, certains de leur prouesse, réussissant ou non
d’ailleurs à dépasser l’image violente, à l’encontre de ces comédiens-là, «
L’homme aux mille visages » a suivi son cinéaste sur le versant autrement plus
fantastique de la contamination pour délivrer, grâce à ces incarnations
monstrueuses, l’insondable secret Lovcraftien : en chacun de nous, en nous, en
notre corps se profile un monstre.
Filmographie :
1944 LE FANTÔME
DE LA MOMIE (THE MUMMYÕS GHOST de Reginald
Le Borg)
1930 LE CLUB DES
TROIS (THE UNHOLY THREE de Jack
Conway)
1928 A L'OUEST DE ZANZIBAR (WEST OF ZANZIBAR) de Tod
Browning)
1927 LONDRES APRÈS MINUIT (LONDON AFTER MIDNIGHT de Tod Browning)
1927 L'INCONNU (THE UNKNOWN de Tod Browning)
1926 MARINES D'ABORD ! (TELL IT TO THE MARINES de George Hill)
1926 L'OISEAU NOIR (THE BLACK BIRD de Tod Browning)
1926 LA ROUTE DE MANDALAY (THE ROAD TO MANDALAY de Tod Browning)
1925 LE FANTOME DE L'OPERA (THE PHANTOM OF THE OPERA de Edward Sedgwick)
1924 LARMES DE CLOWN (HE WHO GETS SLAPPED de Victor Seastrom (Sjöström))
1923 NOTRE-DAME DE PARIS (THE HUNCHBACK OF NOTRE-DAME - de Wallace Worsley)
1923 LA TERRE A
TREMBLÉ (THE SHOCK de Lambert
Hillyer)
1920 SATAN (THE PENALTY de Wallace Worsley)
Lien vidéo :
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http://www.youtube.com/watch?v=zhC7fK9ui2g
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http://www.youtube.com/watch?v=Tjoae0aD4XM&feature=related
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http://www.youtube.com/watch?v=PB3IdgzJLWA&feature=related